La fureur de vivre. Vingt-huit secondes interminables pendant lesquelles la Faucheuse l'a nargué. Romain Grosjean est revenu au micro de Canal+ sur son terrible accident survenu dimanche dernier au départ du Grand Prix de Bahreïn. Totalement conscient lors de l'accident, le Français a eu toutes les peines du monde à sortir de sa monoplace baignant dans un enfer de flammes. Comme dans un film dramatique, le pilote Haas a dû faire face à plusieurs obstacles sans lesquels il serait peut-être resté moins longtemps dans le brasier.
"Je me souviens de tout", explique Romain. "L’impact, malgré le chiffre de 53 g, ne m’a pas semblé plus violent que ça. J’ai défait ma ceinture de sécurité. J’ai voulu sortir de la voiture, et je me suis retrouvé bloqué. Je me suis dit : ‘Bon, je dois être sur le toit. C’est pas grave, on va venir me chercher’.”
"Je me suis rassis, j’ai attendu", poursuit le Franco-Suisse. "J’ai regardé du côté gauche, j’ai vu une grande couleur orange, sans réaliser ce que c’était au début. J’ai ensuite compris qu’il y avait le feu. J’ai voulu sortir à du côté droit, je n’y suis pas arrivé."
"Mon tour de cou, cet élément de sécurité censé retenir et protéger la tête des pilotes, s’est détaché. C’est lui qui me bloquait la sortie du côté droit. On l’a déjà vu, notamment dans l’accident d’Alex Albon. Alex est passé hier et il m’a dit que quand il a eu son accident vendredi aux essais libres 2, son tour de cou s’était aussi détaché.”
J’ai essayé (de sortir) à gauche, sans y arriver non plus. Alors, je me suis rassis en pensant à Niki Lauda. J’ai juré un peu, en me disant que ça ne pouvait pas se terminer comme ça, que ma dernière course ne pouvait pas être celle-là.”
“Je me suis rassis encore une fois, et j’ai vu la mort. Je me suis dit que c’était fini, que j’allais mourir. Le corps se relâche à ce moment-là, comme s’il acceptait… Je me demande alors de quel côté je vais commencer à brûler, si ça va être douloureux.”
“Puis, je pense à mes enfants, et je tire sur mon pied gauche comme pas possible, pour le débloquer. J’ai réussi à extirper mon pied, et ma chaussure est restée coincée. J’ai tourné la tête sur le côté. J’ai mis mes mains dans le feu et j’ai vu mes gants – normalement rouges – commencer à noircir et à brûler. J’ai eu mal aux mains.”
"Mais j’ai réussi à passer la tête, et puis mon buste. Et à partir de ce moment, à partir du moment où j’ai passé mon buste, j’ai su que j’allais vivre.”
“Puis, j’ai senti la main de Ian Roberts, qui est venue accrocher ma combinaison, qui m’a tiré vers l’avant pour me faire tomber du bon côté du rail. Il m’a tapoté le dos : je ne savais pas si j’étais une boule de feu ou pas. J’ai tout de suite enlevé mes gants, car je ne voulais pas que la peau colle au tissu… Sur le moment, pourtant, c’est le pied qui m’a fait le plus mal.”
Quatre jours seulement après son crash, accompagné de son épouse Marion Jollès, Grosjean, qui est remplacé ce week-end par Pietro Fittipaldi, a fait une apparition remarquée et ovationnée dans le paddock du circuit de Sakhir.
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